La présidente de SOS autisme : « J’accuse le gouvernement de maltraitance vis-à-vis des personnes autistes »

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TRIBUNE. Olivia Cattan, présidente de SOS autisme France, déplore la dégradation du traitement des personnes autistes en France. Elle revient notamment sur l’échec de la scolarisation des enfants autistes.

Olivia Cattan, présidente de SOS autisme France
Olivia Cattan, présidente de l'association SOS autisme France.
Olivia Cattan, présidente de l’association SOS autisme France. AFP / © Alain Jocard

Voici sa tribune. Marseille, une mère face aux crises de son fils autiste de 11 ans le tue avec une arme blanche. Bordeaux, un jeune-homme de 23 ans est séquestré, torturé, extorqué et subit des tentatives de viol et de violences répétées. Cinq personnes condamnés. Touraine. Émilie est retrouvée morte dans un centre d’accueil pour adultes autistes. Loire Atlantique, Cynthia, une autiste de 13 ans, meurt mystérieusement dans une baignoire d’un Institut médico-éducatif. Tours, Julien, un jeune autiste de 20 ans meurt dans une baignoire d’une clinique psychiatrique.

Carcassone, Farès, 12 ans et épileptique, subit des violences et un harcèlement. Poussé dans les escaliers, le directeur propos à la famille de le déscolariser. Besançon, un enseignant suspendu pour avoir discriminé un enfant autiste de 5 ans. Il a tenu des propos dégradants et a fait de cet enfant la risée de la classe. Villars-de Lans, Thomas, collégien de 12 ans, est traité comme un chien dans son collège. Placé au fond de la classe, tout le monde se moque lui et aucun aménagement n’a été mis en place. Déscolarisé, sa mère doit l’éduquer à domicile. Isère, Gautier, Manon, Raphaël, Gabriel, comme 650 enfants autistes sans déficience mentale ont été déscolarisés ; Une mère a décidé de monter une structure afin d’accueillir tous ces enfants. Loire Atlantique, Milon 12 ans ne peut pas aller à l’IME, faute de place. Lannion. Faustine n’a pas de place au lycée parce qu’il n’y a pas de structures Ulis dans sa région Vitré. Yohan, autiste de 12 ans et demi, est refusé dans son transport collectif. Lyon, Olivier, autiste de 10 ans a été exclu de la cantine à cause d’une simple crise de panique due à l’absence de son intervenant qui n’avait pas été remplacé. Nantes, pas d’aide humaine pour permettre à son fils de 11 ans, autiste et épileptique, d’aller à la cantine. Bretagne, Samuel après 150 refus d’embauche à cause de son autisme, finit par créer sa propre entreprise, soutenu par ses seuls parents.

Echec de l’inclusion scolaire

Monsieur le Président, durant des décennies, la situation des personnes autistes s’est dégradée dans la France entière. Ces quelques articles de presse ne sont que de minuscules preuves comparées au désespoir grandissant des familles qui n’ont même plus la force de se battre contre votre gouvernement préférant se mobiliser pour offrir eux-mêmes un avenir à leurs enfants.

La scolarisation de nos enfants différents est loin de s’être améliorée. Le manque d’AESH est toujours d’actualité. Au lieu de revaloriser ce métier précaire, vous avez participé à sa destruction massive à cause des PIAL, ces pôles inclusifs d’accompagnement localisés, qui ne fonctionnent pas. Parties en masse, ces auxiliaires mutualisées en ont eu assez de courir d’un Établissement à un autre, d’un enfant à un autre, d’un handicap à l’autre avec une formation plus que sommaire et un salaire de misère.

Lorsque Monsieur le ministre de l’Éducation nationale agite le chiffre de 430.000 élèves en situation de handicap scolarisés jouant sur des chiffres abstraits. 430.000 sur combien d’enfants handicapés déscolarisés ? De combien d’heures de scolarité ces enfants bénéficient-ils ? Ont-ils un accompagnement adéquat ? Combien d’élèves en primaire, au collège et au lycée ? Combien de bacheliers ? Il est inacceptable de dissimuler l’échec de l’inclusion scolaire et les discriminations odieuses que nos enfants subissent derrière les mots usés d’Égalité des chances et d’école de la République. Non Monsieur le Président, il n’y a ni entraide ni empathie dans votre école publique, ni d’égalité ni de fraternité pour nos enfants considérés toujours comme des sous-élèves et des sous citoyens.

Multiples discriminations

Qu’en est-il de la formation des professeurs et de la sensibilisation des Établissements scolaires que vous deviez faire au début de votre premier quinquennat ?

Où sont ces nouveaux centres spécialisés permettant d’accueillir les enfants qui ne peuvent pas suivre une scolarisation ?

Où sont ces filières d’apprentissage pour les jeunes adultes qui ne trouvent pas de travail faute de formation et de scolarisation ?

Pourquoi ne pas réaliser, comme SOS racisme l’a fait en son temps, de grandes opérations de testing pour mettre en évidence les discriminations à l’embauche dont les autistes sont victimes ?

Ou en sont les contrôles de tous les Institutions médicalisées afin de vérifier la bientraitance des personnes en situation de handicap ?

Où en est notre plainte avec les Agences de Santé contre ces Fondations, associations et Médecins, avec lesquels vous travaillez toujours, et qui se sont pourtant servies des enfants autistes comme cobayes pour mener des expérimentations illégales ?

Promesses non tenues

Malgré votre volonté affichée, les promesses que vous m’avez tenues dans ce petit bureau à quelque jour de votre Élection, aucune n’a été tenue. Ces 6 années de pouvoir se soldent par un bilan catastrophique malgré de belles campagnes de communication qui tentent désespérément de faire croire que la situation des personnes autistes a changé en France. Mais rien n’a changé dans notre quotidien ni sur le terrain.

Chaque année, nous avons eu le droit à vos gadgets dans lesquels vous avez dilapidé une grande partie du budget de l’autisme sans prouver l’efficacité de ces outils. Hier une « Plateforme autisme », un simple annuaire téléphonique dont nous avons prouvé l’inefficacité et qui a couté des milliers d’euros. Aujourd’hui, une « Maison de l’autisme » qui n’apportera aucune solution concrète. Pourquoi ne pas avoir plutôt consacré ces « 550 millions d’Euros » à l’amélioration de l’école inclusive, des filières d’apprentissage, du logement inclusif ou des Institutions médicalisées ?

Voilà donc ce qu’il restera de votre passage à la Présidence de la république, des gadgets à la seule gloire de votre image médiatique ?

Une vie de combat

Connaissez-vous le parcours du combattant de toutes les familles ? Il faut se battre pour trouver des médecins capables de nous faire un diagnostic ; il faut se battre pour trouver des psychologues, des orthophonistes et psychomotriciennes formées. Il faut passer de longues heures à remplir ces dossiers administratifs MDPH pour une allocation qui ne couvre que partiellement tous les frais engagés dans une bonne prise en charge. Assister à des réunions éducatives où il faut défendre les droits de votre enfant afin de valider son PPS pour obtenir de maigres aménagements. Se battre encore pour que notre enfant soit accepté à l’école, pour avoir plus d’heure de scolarisation, une accompagnante présente chaque jour, pour qu’il soit autorisé à aller à la cantine. Se battre encore pour qu’il ne soit pas déscolarisé chaque année tout en luttant contre certains professeurs qui pensent que nos enfants n’ont pas leur place à l’école, parfois se battre encore lorsqu’il est harcelé, discriminé ou violenté. Et si cet enfant arrive par miracle jusqu’au Bac, le combat ne fait que commencer pour qu’il trouve une école qui l’accepte afin de mener des études supérieures. Puis se battre encore pour trouver un logement inclusif et un emploi afin de le rendre autonome pour pouvoir enfin rendre les armes, tranquillisés enfin sur son avenir.

Imaginez-vous Monsieur le Président une vie de combat sans aucun répit possible ? Une vie faite de dettes et de crédit pour pouvoir combler les préjudices et les manquements de l’État français ? Alors Monsieur le Président, en tant que Présidente de SOS autisme France, mère d’enfant autiste, j’accuse votre gouvernement de maltraitance vis-à-vis des personnes autistes. Comme le dirait Victor Hugo : « la première égalité, c’est l’équité » et tant que nos enfants seront traités injustement et qu’ils ne pourront pas bénéficier des Institutions de l’État comme les autres citoyens de ce pays, j’encourage toutes les familles à porter plainte massivement contre l’État et à demander des dommages et intérêts lorsqu’elles ne peuvent offrir à leurs enfants une éducation, une AESH, une formation professionnelle, des prises en charge, et un logement. Certains jugements ont été déjà rendus en leur faveur, il faut continuer. Je les encourage à trainer votre gouvernement devant les tribunaux pour faire valoir le droit de leurs enfants ainsi que devant les Instances européennes qui ont condamné la France à multiples reprises. Après l’urgence climatique, l’urgence autistique doit être au cœur de vos préoccupations politiques. Peu importe le quoi qu’il en coûte, Monsieur le Président, il vous reste deux ans afin de tenir vos promesses

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