Mais qui veut du coaching des adultes autistes ? (et de quel « coaching » parle-t-on ?)

En parallèle de l’offensive médiatique des responsables de la « stratégie autisme », voilà que débarque une mobilisation générale en faveur du coaching dans l’autisme : formations labellisées CNRS et dédiées, site spécialisé de mise en relation avec une multitude d’intermédiaires, publicité relayée dans les réseaux possibles, subsides ministérielles, c’est entendu : le « job coaching », géré par des professionnels formés via des organismes estampillés, serait LE remède aux problèmes d’emploi des adultes autistes.

Reste à examiner dans quelles conditions cette promotion du job-coaching est menée…
On vous prévient : c’est (vache-à) laid.

Les adultes autistes sont-ils demandeurs de « coaching » ?

D’après l’enquête de l’association Asperansa (ici : https://www.asperansa.org/enquete_2017/resultats.html ), qui reste la seule grande enquête consacrée aux besoins des adultes autistes et via laquelle les premiers concernés s’expriment en direct… pas vraiment : seuls 30 % des répondants y sont favorables. La première demande (55 % d’adhésion) porte sur des aménagements du poste et des horaires, un passage au temps partiel, et du télétravail. Les adultes autistes sont… des adultes (surprenant, non ?), en recherche de solutions qui diminuent leur stress et leur inconfort dans l’emploi, plutôt que d’encadrements supplémentaires et potentiellement infantilisants.

Sont-ce les entreprises qui demandent le coaching ?

Les besoins des entreprises ont toujours porté sur le recrutement de personnels capables de travailler efficacement et immédiatement, en générant le moins de « charges » possibles. On imagine mal que la rémunération d’un ou une coach spécifiquement pour encadrer un adulte autiste puisse constituer une priorité d’entrepreneurs. Par ailleurs, les entreprises annoncent quasi-unanimement vouloir recruter des adultes autistes « peu handicapés », en faisant référence aux « Asperger »… et sur des postes « en tension », typiquement dans les métiers de l’informatique.

Seule conclusion : le coaching est demandé en premier lieu… par les coachs, motivés par la promesses de subsides étatiques à foison.

L’armée de l’autibusiness et ses systèmes de contrôle

Des « coachs » qui rivalisent d’inventivité dans l’autibusiness pour fourguer des systèmes de contrôle dont les adultes autistes ne veulent pas : bracelets connectés vendus à prix d’or, montres connectées pour donner des ordres à distance ; si la place des adultes autistes ne peut plus, fort heureusement, être l’hôpital psychiatrique, les conditions de « remise au travail » s’apparentent à de la surveillance pénitentiaire, ce alors qu’ils n’ont commis aucun crime.

L’armée d’intermédiaires plus ou moins vautours qui s’insère entre les personnes autistes, les entreprises et le Pôle emploi / Cap emploi, a tout intérêt à faire accroire son indispensabilité, d’où une diffusion massive d’informations ne correspondant pas à la réalité. Par exemple, alors que les études disent que les problèmes de rejet de l’emploi découlent d’incompréhensions bilatérales, sur les sites web business précités, seule la « déficience sociale » de la personne autiste est mise en avant en tant que frein à l’employabilité (il faut bien caresser l’employeur dans le sens du poil, c’est lui qui paie). Alors qu’il est très clair que la majorité des adultes autistes ne s’intéressent pas à l’informatique, ces sites et formations business vendent de « l’autistinformaticien productif » au mépris des centres d’intérêts réels.

Le bon coach, c’est celui dont un adulte autiste peut rapidement se passer

… de même que la souffrance de l’autiste est une nécessité vitale pour le psychiatre, l’entretien de la croyance en la nécessité pérenne du job-coach sert en premier lieu à leur sécuriser « l’encadrement » des-dits adultes sur des années et des années, une belle rente, et à recycler les compétences de professionnel(les) vers le contrôle d’autrui. Les coachs manipulateurs se présentent ainsi comme l’unique solution à toutes sortes de problèmes, tant auprès des adultes autistes qu’auprès des entreprises et des pouvoirs publics.

Vous êtes harcelé au travail ? Ils vous vendent un coaching intensif, promettant de restaurer votre confiance et votre force. Vous n’aimez pas être touchés ? C’est parce que vous n’avez jamais rencontré quiconque serait capable de réactiver votre production d’ocytocine… Vous êtes un chef d’entreprise informatique en questionnement ? ils vous vendent une armée d’Autistinformaticiens dociles et productifs, qui n’a jamais existé qu’à la télé…

Les propositions sur ce « marché » mélangent allègrement des concepts et des pratiques relevant de la psychothérapie et du coaching, certaines relevant de pratiques sectaires, en ce qu’elles visent à chercher des failles, s’y immiscer, rassurer le « client », lui devenir de plus en plus « indispensable »…

S’il existait une équation du « bon » coach, peut-être pourrait-on la formuler ainsi : « le degrés de compétence d’un(e) coach est inversement proportionnel aux efforts déployés par ce(tte) coach pour rendre les adultes autistes et les entreprises dépendants de lui/d’elle ».

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